
THADDÉE DUCHAINE
Quel prénom original, direz-vous.
Mais il est représentatif du caractère particulier de cet homme, d'origine très modeste. Il a fait vivre à ses proches une vie remplie d'aventuires et de rebondissements, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, aux État-Unis et à Causapscal, dans la vallée de la Matapédia.
La vie de cet homme spécial
Thaddée est né le 17 juillet 1854 et il a été baptisé en l'église Saint-François-Xavier de Chicoutimi. Son père se prénommait Charles et sa mère se nommait Albine Boulianne.
Le 15 septembre 1874, il a épousé Marie-Josephte Gagné, à Laterrière. Il était mineur, mais son épouse était majeure. Alors que le couple demeurait à Saint-Jérôme, Josephte est décédée en octobre 1977 après avoir donné naissance à Mairie-Emma, le 21 mars 1876. Malheureusement, cette enfant est décédée en décembre 1878
Thaddée s'est remarié le 19 février 1878 avec Olive Desgagnés, à Metabetchouan. Olive a donné naissance à 12 enfants, dont neuf ont survécus: 5 garçons (Ernest, Jean, Joseph, Robert et Albert) et quatre filles (Marguerite, Marthe, Anne et Marie). La famille a vécu principalement à Saint-Gédéon.
Comme beaucoup de Canadiens-français de l'époque, Thaddée a tenté l'aventure américaine en déménageant avec toute sa famille aux États-Unis, en 1898, pour travailler ans des usines de textiles. Déçu de son aventure, il est revenu à Saint-Gédéon quelques années plus tard où il a cultivé sa terre en plus d'agir comme huissier de justice.
Mais, en 1914, il a décidé d'acheter une terre à Causapscal et d'y déménager presque toute sa famille.
C’est à cet endroit qu’il a été indirectement confronté à un homme richissime et très puissant, George Stephen, mieux connu sous le nom de Lord Mount Stephen.
George Stephen a joué un rôle important dans le développement du Canada, à la fin du 19e siècle, en complétant la construction du chemin de fer qui traverse le pays d’un océan à l’autre. Grand amateur de pêche au saumon, il a acheté des droits de pêche sur plusieurs rivières gaspésiennes, contribuant ainsi au développement de la vallée de la Matapédia et de la ville de Causapscal. Bon nombre de bâtiments qu’il y a fait construire, à la fin du 19e siècle, sont, de nos jours, gérés par le « Site patrimonial de pêche Matamajaw ».
Peu de temps après son arrivé à Causapscal, Thaddée a prétendu qu’il était le propriétaire des droits de pêche exclusifs sur la partie de la rivière Matapédia qui jouxtait la ferme qu’il venait d'acheter.
Une série de procès a eu lieu et, en 1919, la Cour Suprême du Canada lui a donné raison.
Mécontents face à cette décision qui leur faisait perdre une partie de leurs privilèges, les dirigeants du Matamajaw Salmon Club ont porté cette décision devant le Conseil privé du Parlement de Londres.
Cette cour de justice spéciale était une instance de la Chambre des lords britanniques où siégeait George Stephen, qui résidait alors en Angleterre. À cette époque, ce Conseil privé était l’autorité ultime sur l’administration de la justice au Canada
Le Conseil privé a décidé, en 1921, de renverser la décision de la Cour Suprême du Canada et, en conséquence, de donner raison au Matamajaw Salmon Club.
Mais Thaddée n'était plus de ce monde à ce moment, ayant décédé accidentellement le 29 août 1920.
De nos jours, cette décision fait toujours partie de la jurisprudence invoquée dans des pays du Commonwealth britannique lorsqu’un procès implique un cours d’eau navigable ou non-navigable et qu’on se retrouve dans un pays où s’appliquent un Code Civil et le Common Law.